Le piège de la radicalisation : Entretien avec Laurent Mucchielli

Lien Social 13/01/11 – p. 58-59
Nous vous proposons ce texte comme antidote à toutes les annonces sécuritaires que nous devons traiter. L’analyse est connue, mais toujours à relire et les formulations peuvent vous être utiles.

Un certain nombre de lois votées pour réduire la délinquance ? Quels résultats et conséquences ?
- Depuis 2002 code pénal ou de procédure pénale modifié en moyenne tous les 6 mois... et ce n’est pas terminé.

  • « La loi ne sert plus à changer la société, elle n’a plus que valeur de symbole et sert surtout à envoyer des messages »

- Lors du vote de déchéance de nationalité pour meurtre d’agents dépositaires autorité publique, il a été demandé combien de criminels cela aurait concerné dans les 3 dernières années... question restée sans réponse :

  • d’après mes calculs cette disposition aurait concerné 1 meurtre sur les 10 dernières années...
  • « Une loi pour un cas. Nous en sommes là. Dès lors, il ne faut pas s’étonner si ces lois n’impactent quasiment pas la réalité ».
Doit-on craindre des flambées de violence ?
- « Cela se produit en permanence  » : fin septembre c’était à Brest
  • «  la chose tend en réalité à se banaliser »
  • « Le pouvoir et les médias ne cessent de s’effrayer de la violence croissante des émeutiers (...) mais ils ne remarquent évidemment pas que cette violence est symétrique, que c’est un cercle vicieux ».
  • Le nouveau préfet de Grenoble annonce une « super-brigade anti criminalité »
  • «  On sait qu’une partie de la hiérarchie (...) se prépare à la guerre urbaine. C’est une véritable spirale infernale »

En quoi ces mesures peuvent-elles invalider le travail des éducateurs de rue ou ceux de la PJJ ?
- « Elles le rendent de plus en plus difficile et donc de moins en moins performant » :

  • la pression sécuritaire renforçant la barrière mentale construire entre « Eux  » et « Nous  », il faut davantage de temps pour gagner la confiance de populations se sentant stigmatisées.
  • « Dans un certain nombre de cas, les éducateurs n’y arrivent plus »

- Il faut « susciter et accompagner des prises de conscience locales (...) afin de mettre en place des contre-feux, des systèmes locaux de solidarité entre acteurs politiques, institutionnels et associatifs assumant d’autres stratégies »