Justice des mineurs : un entretien avec M. Rosenczveig et des alertes

ASH – 28/03/08 – 08 133
Nous aimons M. Rosenczveig et sa vision à la fois « terrain et grand angle ». Un rien provocateur ; un ton qui fait du bien mais des réponses qui rappellent aussi que rien n’est tout à fait simple… En deuxième partie, les alertes du secteur en parlant de la loi relative à la prévention de la délinquance de manière concrète, renforcent ses propos. On apprend… là même où l’on peut penser tout savoir.

Le groupe de travail sur la réécriture de l’ordonnance de 1945 devrait démarrer le 4 avril
Questions à M. Rosenczveig, Pdt tribunal pour enfants de Bobigny (93) et de DEI France
Vous contestez l’objectif de rendre la justice des mineurs plus rapide…. Je ne le conteste pas mais « je m’interroge sur son actualité » : en 1992 le traitement en temps réel a commencé, d’abord dans le 93 et puis généralisé.
En 1980 il n’y avait que 2 réponses : classer sans suite ou poursuivre. Aujourd’hui 8 possibilités.
Dont composition pénale, défèrement au tribunal après la garde à vue (50 % des mineurs à Bobigny à 2007) et jugement sur présentation immédiate par ex.
55 % des situations traitées directement par les parquets alors qu’il y a 20 ans 40 à 60 % étaient classées sans suite… et encore 11 % en 2006.
L’autorité judiciaire a répondu à la nécessité d’aller plus vite. Mais 4 infractions sur 5 pas déclarées et taux de poursuite policière de 30 %...
Que pensez-vous de la proposition de définir un âge minimal de responsabilité pénale ? La CIDE, ratifiée par la France recommande la détermination d’un âge fixe. La France utilise le critère du discernement de l’enfant (7/8 ans).
L’ordonnance 45 prévoit mesures éducatives à 7-8 ans, sanctions éducatives à partir 10 ans, prison à partir 13 ans et retrait de l’excuse de minorité à 16.
Cette gradation est pragmatique et intelligente.
Si on fixe l’âge de manière tranchée, ne faudrait-il pas le faire aussi pour les personnes âgées ? A quel âge perd-on le discernement ?
Et si l’objectif est d’abaisser l’âge de la majorité pénale, il faudrait aussi abaisser celui de la majorité civile : logique d’accès à l’exercice parallèle des droits et des devoirs.
Vous êtes dubitatif sur l’intention de toiletter le texte….
« L’objectif est de réformer radicalement la justice des mineurs pour la durcir » et de concentrer PJJ et juges des enfants sur le pénal.
La PJJ va refuser les mesures en milieu ouvert : dans le 93 450 mesures ne seront plus prises en charge si le Dpt ne les met pas en œuvre. Désengagement Etat.
« On affiche le souci d’une répression plus rapide (…) en oubliant que protéger un enfant en danger, c’est diminuer les risques de délinquance ». Déjà 400 mesures ne sont pas exécutées, et attente de 2 - 3 mois, parfois 6 !!
« Donner à la justice les moyens d’appliquer la loi est de la responsabilité des pouvoirs publics »
« Les jeunes sont hors la loi plus tôt et de manière plus violente. Mais en rejeter la responsabilité sur les seuls juges, travailleurs sociaux ou policiers est aberrant ! »
On fait du «  maire le pilote de la prévention : où est la valeur ajoutée ? on joue à la patate chaude »
«  Il n’y a toujours pas de politiques de prévention primaire » « Tout cela est daté et ne tient pas compte de ce qui s’est passé depuis 20 ans »

4 fédérations de la CGT alertent sur les risques qui pèsent sur l’AEMO
CGT Santé action sociale, Services publics, PJJ & Ingénieurs, cadres et techniciens à l’occasion du congrès Cnaemo (26 mars)

- Application la loi relative à la délinquance
Commence à « être source de conflit dans les services de milieu ouvert ».
« Il n’est plus du tout exceptionnel qu’un maire demande à un service de prévention spécialisée ou d’AEMO de rendre des comptes sur la situation d’un jeune et de lui transmettre des infos nominatives »
En outre les décrets de la loi réformant la protection de l’enfance tardent à venir…

- Recentrage de la PJJ sur le pénal
Objectif de ne plus mettre en œuvre de mesures civiles d’ici à 2011 (voir « dossier signalétique »)
+ Projet : spécialiser juge des enfants sur le pénal.
Question de fond «  faut-il vraiment retirer tout contrôle par la justice de la protection de l’enfance ?  » et logique comptable qui aboutit déjà à des tensions dans certains Dpts.
« Les mesures civiles ne sont plus budgétées dans le services de la PJJ »…Evaluation à 300 millions le transfert de charges nécessaire aux Dpts… « les élus s’inquiètent »
Crainte du secteur  : renforcements de la pression budgétaire sur le secteur habilité : augmenter le nb de mesures, ou transmettre infos…
Sans oublier la « révision générale des politique publiques… » ARS…