« Il faut inventer un autre rapport entre l’individu et le collectif »

09 – 341 – ASH 22/05/09 – pp. 40-41
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Nous aimons parce que ça ouvre un débat ; c’est un point de vue à ne pas prendre pour une vérité scientifique mais on peut s’en saisir pour réfléchir et notamment sur la question de l’instrumentalisation ou non du travail social dans l’accompagnement de la souffrance psychosociale.

Entretien avec M. Coupechoux
Journaliste indépendant auteur de La déprime des opprimés - enquête sur la souffrance psychique en France

- Pourquoi cette enquête ?

  • Elle est venue à la suite de mon enquête sur la folie, où je voyais beaucoup de patients des psychiatres atteints de souffrance « psychosociale »

- Vous faites le lien entre cette souffrance et le travail

  • J’ai rencontré très vite ce lien et je prends travail au sens large ; « ceux qui ont un travail souffrent, mais aussi ceux qui n’en ont pas »
  • C’est un phénomène massif et violent. Dès les années 90, les médecins ont vu « des tableaux de type post-traumatique », et dans toutes les catégories professionnelles.

- Quelles sont les caractéristiques de la souffrance actuelle au travail ?

  • Les conditions de la souffrance : on a organisé la solitude dans l’entreprise.
  • Et ont « explosé » des structures traditionnelles (famille, collectifs politiques…), qui aidaient à porter la souffrance.
  • Maintenant le plein emploi n’existe plus et « il n’y plus de positions de repli pour l’individu ».

- Vous parlez d’une « pathologie de la solitude ». ??

  • « On a voulu faire de l’individu le cœur de toute vie sociale » ;
  • Dans l’entreprise autonomie et polyvalence on rompu avec le taylorisme mais on a placé les gens en concurrence et ils ont été plus isolés qu’autonomes
  • L’insécurisation se répand : 1 Français sur 2 dit avoir peur de devenir un jour SDF.

- Le travail est-il une sorte de pathologie ?

  • « Au contraire ». si on pense cela on mettra en place un système pour gérer cette souffrance et on ne se posera plus les questions de fond.

- Les professionnels du social et de la santé mentale participent-ils à leur insu à ce processus ?

  • Ils essayent d’aider les gens mais ils font partie de la régulation que met en place le système.
  • Il ne faut pas s’installer dans cette situation.
  • Chez les professionnels de la santé mentale apparaît là-dessus un débat « politique » ; les travailleurs sociaux, eux, affrontent de très grosses difficultés et tâchent de « garder la tête hors de l’eau ».

- Vous appelez à une réhabilitation du sujet… ??

  • Citoyens et salariés sont dépossédés des choix qui les concernent : « le sujet est dans une cage d’acier invisible », (expression de Max Weber) et il faut lui donner la priorité.
  • « L’individu ne peut pas vivre sans le collectif » : mais il faut repenser les terms des rapports et fonctions du politique, du travail social, etc.

- Ed. Seuil - 384 p – 21 €